Chemises à fleurs, musique hawaïenne, chaises en rotin et mugs en céramique inspirés des divinités polynésiennes : avec leur univers exotique, les cocktails Tiki sont une véritable invitation au voyage. Mais pas seulement. Derrière cette image tropicale se cache une histoire et une culture riche et souvent méconnues.

 

> Le Tiki, l’emblème de la culture polynésienne

 

Mi-homme, mi-dieu, le Tiki est considéré comme le créateur de l’homme dans la culture polynésienne. Omniprésentes en Polynésie, les statues Tiki protègent les habitants des mauvaises énergies. S’il fait partie intégrante de la culture polynésienne, le Tiki est également devenu un symbole du Pacifique.

 

> Retour aux sources…

Tout commence en 1934 lorsque Ernest Raymond Beaumont Gantt, alias Don Beachcomber, de retour d’un voyage dans les mers du Sud, ouvre son premier bar à Hollywood : le Don’s Beachcomber Cafe. Dans ses valises, il a rapporté de nombreux objets exotiques mais il s’est surtout initié aux secrets du rhum, le spiritueux indissociable de la culture Tiki.

 

 

> « Si vous ne pouvez aller au paradis, je vous l’apporterai », affirmait Beachcomber.

 

Aux États-Unis, où la prohibition a pris fin un an plus tôt, l’heure est à la dépression économique. Pour fuir leur quotidien, les Américains jettent leur dévolu sur les films ayant pour cadre les mers du Sud et ils écoutent de la musique hawaïenne. Désormais, ils peuvent aussi s’évader au Don’s Beachcomber Cafe où ils s’offrent des cocktails Tiki. Par la même occasion, ils découvrent le rhum à une époque où le whisky et le gin règnent en maîtres.

 

> Don Beachcomber et Trader Vic : les deux papes du Tiki

Le succès est très vite au rendez-vous. Même les plus grandes stars de l’époque se retrouvent chez Beachcomber. D’ailleurs, après avoir inauguré un bar plus grand à Los Angeles, le Don The Beachcomber, il ouvrira une vingtaine d’adresses dans tous les États-Unis où rien ne résiste à la mode Tiki.

De quoi inspirer Victor Jules Bergeron, alias Trader Vic. En 1937, ce dernier transforme son petit bar d’Oakland, dans la baie de San Francisco, en temple du Tiki. Une culture qu’il va exporter bien au-delà des frontières du pays. Bergeron va en effet ouvrir une vingtaine d’établissements aux États-Unis mais aussi à Beyrouth, à Bangkok ou encore à Hambourg.

 

> La naissance de la mixologie moderne

 

Au-delà de l’imaginaire exotique de cette vague Tiki, c’est avec leurs cocktails que Don Beachcomber et Trader Vic vont véritablement marquer l’histoire de la mixologie. Car leurs long drinks ne mettent pas seulement le rhum à l’honneur : ils remettent aussi en cause la construction des cocktails généralement limitée à trois ou quatre ingrédients.

Alors qu’un cocktail pré-prohibition compte le plus souvent trois ingrédients, les drinks Tiki peuvent se composer d’une quinzaine de produits différents.

 

> Le rhum : la star de la culture Tiki

 

Dans les cocktails Tiki, le rhum, incontournable, se conjugue souvent au pluriel. Beachcomber est en effet connu pour associer plusieurs rhums afin de créer son propre blend : une eau-de-vie de canne unique et extrêmement complexe. S’il est considéré comme l’un des plus grands bartenders de l’histoire, c’est aussi grâce à ses mix de jus d’agrumes plus riches en arômes que le jus de citron utilisé seul, tout comme ses sirops de fruits et d’épices destinés à remplacer le simple sirop de sucre.

 

> Des cocktails qui sont entrés dans l’histoire

 

L’héritage de la culture Tiki, qui a aussi remis au goût du jour le rituel du punch bowl, ne se limite pas à cette approche résolument moderne. Beachcomber a également donné naissance à des recettes de cocktails qui sont entrées dans l’histoire, à commencer par son célèbre Zombie, sa création la plus alcoolisée. Comptez près de 12 cl de rhum par drink ! Il conseillait d’ailleurs de ne pas en boire plus de deux…

Quant au Mai Tai, le cocktail qui symbolise à lui seul la culture Tiki, Trader Vic et Beachcomber revendiquaient tous les deux sa création. Si, aujourd’hui encore, le mystère reste entier quant à sa paternité, il mérite tout de même d’être découvert ou redécouvert ! D’ailleurs, avec le renouveau du cocktail des années 2000, la culture Tiki, qui était un peu tombée dans l’oubli, a fait un come-back remarqué sur le devant de la scène mixo.

 

 

 

Pour en savoir plus :

Beachbum Berry Remixed, par Jeff « Beachbum » Berry, Éditions Club Tiki Press

The Book of Tiki et Tiki Modern, par Sven Kirsten, Éditions Taschen

 

> Trois cocktails Tiki incontournables

 

– Mai Tai, l’icône de la culture Tiki

#complexe#acidulé#gourmand

 

Ingrédients :

3 cl de rhum vieux jamaïcain

3 cl de rhum vieux agricole

2,5 cl de jus de citron vert

1,5 cl de sirop d’orgeat

1,5 cl de curaçao

 

Garnish :

1 tête de menthe et 1 zeste d’orange

 

Méthode :

Dans un shaker rempli au ¾ de glaçons, verser l’ensemble des ingrédients et shaker. Servir en filtrant dans un verre rocks rempli de glace pilée. Décorer avec la tête de menthe et le zeste d’orange.

 

– Zombie, le monstre sacré

#trèscomplexe#trèspuissant#épicé

 

Ingrédients :

3,5 cl de rhum vieux jamaïcain

3,5 cl de rhum vieux cubain

3,5 cl de rhum demerara overproof

2,5 cl de jus de pamplemousse

1,5 cl de jus de citron vert

1,5 cl de falernum

0,5 cl de sirop de cannelle

1 barspoon de grenadine

6 gouttes d’absinthe

1 dash de bitters Angostura

 

Garnish :

1 tête de menthe et 1 quartier d’ananas

 

Méthode :

Dans un shaker rempli au ¾ de glaçons, verser l’ensemble des ingrédients et shaker. Servir en filtrant dans un verre Tiki rempli de glaçons. Décorer avec la tête de menthe et le quartier d’ananas.

 

 

– Fog Cutter, le drink sans frontières

#puissant#épicé#acidulé

 

Ingrédients :

6 cl de rhum vieux cubain

3 cl de cognac

1,5 cl de gin

6 cl de jus de citron

3 cl de jus d’orange

1,5 cl de sirop d’orgeat

1,5 cl de xérès cream

 

Garnish :

1 tête de menthe

 

Méthode :

Dans un shaker rempli au ¾ de glaçons, verser l’ensemble des ingrédients mis à part le xérès et shaker. Servir en filtrant dans un verre Tiki rempli de glaçons puis toper avec le xérès et décorer avec la tête de menthe.

 

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